samedi 17 février 2024

Marie Bouguereau-Botrel (1873-1937). Légion d'Honneur 1931

Mme Bouguereau-Botrel est une personne du quartier de Robien dont la vie mérite d’être mise en valeur. Avec son mari, M. Gaston Bouguereau, né en 1869 au Mans, agent d’assurance et conseiller municipal, elle habitait la maison du 49 de la rue Luzel. 


Une carrière exemplaire

Marie-Ange-Françoise Botrel est née le 4 août 1873 au Mans. Elle se marie avec Gaston Bouguereau le 10 septembre 1895 au Mans d’où ils sont originaires tous les deux. 

En 1907, on trouve une première trace dans les archives de la Croix-Rouge de Saint-Brieuc de la présence de Mme Bouguereau-Botrel lorsqu'elle devient infirmière diplômée. "Déjà vingt infirmières ont obtenu leur diplôme, certifié par le comité central". 

Registre contenant les archives de la Croix-Rouge de Saint-Brieuc

 
Première page du registre ouvert le 23 février 1887. Archives départementales


Mention de Mme Bouguereau

En 1908, Mme Bouguereau est citée dans le bulletin de la société de secours aux blessés militaires : Le dimanche 2 août 1908 est organisé une grande fête sportive à Saint-Brieuc et sous une tente, décorée du drapeau de la Croix-Rouge, se tiennent prêtes de nombreuses personnes du service médical dont  Mme Bouguereau-Botrel.

Lors de l'assemblée générale du comité de la Croix-Rouge de Saint-Brieuc, elle intègre "les 24 membres devant composer le Conseil des Dames". (Registre des archives de la Croix-Rouge, page 44)

 

Pendant toute la guerre 14-18 

Archives de la Croix-Rouge de Saint-Brieuc. Archives 22

Madame Bouguereau va rendre de grands services à Saint-Brieuc pendant la Première guerre mondiale. Elle sera particulièrement active  au sein de l'Hôpital complémentaire numéro 7 et va se dévouer sans compter, malgré une santé fragile, à toutes les œuvres de guerre. Son action peut être mesurée à la lecture des archives de la section de la Croix-Rouge de Saint-Brieuc pendant toute cette période.

Le 24 mars 1920, un bilan est dressé (page 209) : "Au moment de la mobilisation, le comité de Saint-Brieuc avait pour mission le fonctionnement de deux hôpitaux auxiliaires, l’un inscrit en première série, l’autre en deuxième, ainsi que d’une infirmerie de la gare.
L’infirmerie de la gare installée dans les bâtiments de la gare était prête à fonctionner dès le quatrième jour de la mobilisation
. (page 212). Le personnel est composé de M. Le Docteur du Bois Saint-Seurin, vice-président du comité, médecin chef ; de M le commandant le Vallois, administrateur ; de Mme Bouguereau, vice-présidente, surveillante générale qui avait sous sa direction cinq infirmières diplômées  auxquelles venaient se joindre pour les ravitaillements des infirmières de l’hôpital annexe 3…

Archives de la Croix-Rouge de Saint-Brieuc. Archives 22

Le premier train de blessés est arrivé en gare de Saint-Brieuc le 25 août 1914 à 4h26 du matin (600 hommes venant de Maubeuge). Pendant les cinq années qu’ont duré les hostilités, le nombre de blessés évacués sur Saint-Brieuc a été de 20 000 français, 762 Belges et 786 Allemands.
…Médecins, administrateur, surveillante générale, infirmières et brancardières se sont dépensés sans compter de jour comme de nuit pour ravitailler les blessés, les recevoir, les transporter dans les voitures d’ambulances qui les conduisaient dans les hôpitaux de la ville
". 

Madame Bouguereau se sera occupée des grandes choses comme des petites. Ainsi lorsque le café doit être servi aux permissionnaires du front qui arrivent en gare, les dames infirmières en sont chargées. Le Président de la Croix-Rouge et Mme Bouguereau vont visiter les commerçants et hôteliers et ils obtiennent la garantie d’avoir chaque mois 27 kilos de café (page 195).

Elle sait aussi reconnaitre les mérites des personnes qui travaillent dans son domaine. Ainsi tient-elle à ce que Mlle Bulhière, dévouée responsable du dispensaire, soit félicitée pour son action. (page 207)


 

Après la guerre

La paix revenue, Madame Bouguereau prend la direction du Foyer du Soldat dès sa création. Puis elle est successivement vice-présidente de la Société de secours aux Blessés militaires (Croix-Rouge), animatrice de l’école d’infirmières.

On lui confie plus tard la direction de l’école d’infirmières à l’Hospice de Saint-Brieuc pour la préparation au diplôme d’état et elle devient administratrice du Bureau de Bienfaisance.

Le registre des archives de la Croix-Rouge détaille ces différentes missions :

Page 214 : « À l’heure actuelle, bien que la guerre soit terminée depuis dix-huit mois, une de nos infirmières les plus distinguées, Madame Bouguereau, Vice-présidente de notre comité, continue chaque jour de donner aux blessés, du centre de Réforme de Saint-Brieuc, les soins les plus dévoués et les plus éclairés. »

Le Président du comité explique qu’à la fin de la guerre c’est la lutte contre la tuberculose qui devient une priorité pour la Croix-Rouge au sein de « l’œuvre antituberculeuse ».
Existant depuis 1904, un dispensaire situé rue Renan prolongée demande à être intégré officiellement pour cette lutte en juin 1919.

Au sein du comité de la Croix-Rouge, elle a toujours bénéficié d'une grande confiance, pour preuve lors de l'assemblée générale du 21 septembre 1915, c'est elle qui avait obtenu le plus de voix à l'élection du comité des dames et elle avait été élue pour 5 ans. (page 153, registre de la Croix-Rouge

En mars 1920, au moment du renouvellement des membres, Mme Bouguereau est réélue dans ses fonctions de vice-présidente de la Croix-Rouge jusqu’en 1925. Elle est aussi membre de cinq commissions : dispensaire, propagande, matériel et lingerie, fêtes et Foyer du soldat.(Page 220)

Commissions Croix-Rouge 1920. Archives 22

Après l’élection des responsables, le comité se réunit le 19 juin 1925 sous la présidence de M. Perrio pour le comité des Hommes et de Madame de Verchère pour le comité des Dames. Madame Bouguereau reste à la vice-présidence qu’elle partage avec deux autres dames, mais elle se recentre sur une seule commission, celle du dispensaire.

Élection Croix-Rouge 1925. Archives 22

Le 15 mars 1929 Madame Bouguereau est réélue à son poste de vice-présidente. Elle s’occupe toujours du dispensaire et en plus du Foyer du soldat.(
Page 247)

Élection Croix-Rouge 1929. Archives 22

Un très bel hommage lui est rendu dans un discours du Président de la Croix-Rouge de Saint-Brieuc en 1930 : « Nous avons de brillantes recrues : Mme Bouguereau s’est révélée tout de suite de haute valeur et ses devoirs de composition ont fait l’étonnement du jury. Dans ce temps d’avant-guerre, elle s’est formée pour les grands services qu’elle rendrait à la Croix-Rouge dans les années qui devaient donner aux infirmières bien formées une si tragique raison d’être". ( pages 255 et 256)
 

Les distinctions

Mme Bouguereau-Botrel va recevoir différentes distinctions au cours de sa carrière. Notons en particulier :

Médaille de Bronze de la Reconnaissance française, en octobre 1919 (La dépêche de Brest, 6 octobre 1919)

Médaille d'honneur des épidémies (médaille d'argent), par décision ministérielle du 30 septembre 1919. Publication le 1er janvier 1920 dans le Bulletin de la société française de secours aux blessés militaires. 

1er janvier 1920

Brevet de Capacité professionnel d'infirmière, publication dans le
bulletin de la société française de secours aux blessés militaires du 1er janvier 1925.

Pour ses 28 années de collaboration dévouée aux œuvres d’assistance et d’hygiène publique, elle est décorée Chevalier de la Légion d’honneur en 1931. Publication au Journal Officiel du 17 mai 1931.

Mme Bouguereau-Botrel. Légion d'honneur 1931.

La disparition de Mme Bouguereau-Botrel. 1937
Mme Bouguereau-Botrel décède en juin 1937 à l’âge de 63 ans.

Mme Bouguereau-Botrel 10 juin 1937 Ouest-Eclair

Recensement rue Luzel à Saint-Brieuc, famille Bouguereau-Botrel.

L'avis de décès et un article nécrologique paraissent le même jour dans Ouest-Eclair.

10 juin 1937 Ouest-Eclair


Son décès provoque beaucoup d’émotion et Ouest-Eclair publie le 10 juin un portrait posthume, retraçant la carrière de Mme Bouguereau-Botrel, et exprimant le sentiment commun de reconnaissance : "La défunte était la providence des déshérités, particulièrement dans le quartier de Robien. Le milieu des employés de chemin de fer éprouva, lui aussi, ses qualités inlassables de dévouement. Bref, c’est une femme de grand cœur qui disparaît emportant avec elle les regrets unanimes.

C’est l’abbé Lhotellier, recteur de Robien qui procède à la levée du corps le 11 juin à l’église Sainte-Anne-de-Robien.

Dans le cortège qui mène au cimetière, derrière le char recouvert de gerbes et de fleurs, on note la présence de très nombreuses personnalités du monde religieux,  civil et militaire : des enfants du Bureau de Bienfaisance, une délégation de soldats du 71e, le Maire M. Brilleaud et ses adjoints, les médecins de l’hospice, les directeurs d’établissements scolaires, des délégations de la gendarmerie, de la police, des pompiers…
Au cimetière, M. Fromentin, président de la Fédération des retraités de chemin de fer prend la parole car Mme Bouguereau était leur bienfaitrice, Mme Étienne s’exprime aussi au nom de l’Association pour le Suffrage des Femmes de France, ce qui laisse à penser que Mme Bougereau-Botrel devait militer pour que les femmes puissent avoir accès au vote, au moins était-elle de ce courant de pensée.

 

Gaston Bouguereau, conseiller municipal, décède en octobre 1938 à l’âge de 68 ans, peu de temps après son épouse. Les obsèques ont lieu le 12 octobre 1938 à l’église de Robien.

12 octobre 1938 Ouest-Eclair

 

Le saviez-vous ?

Une biographie de 52 pages de Mme Bouguereau-Botrel a été éditée à l'imprimerie Moderne de Saint-Brieuc, en 1938.



Si vous avez des remarques à partager ou des renseignements à communiquer sur Mme Bouguereau-Botrel, merci d'utiliser le formulaire de contact. 

  

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Sources

Ouest-Eclair : 19 mai 1931, 11 septembre 1933, 10 juin 1937, 12 juin 1937, 12 octobre 1938.

Archives du Mans, acte de naissance de Anne Botrel, vue 162, acte 703.(image ci-dessous)

Recherches dans le Bulletin de la société de secours aux blessés militaires. 

Archives départementales des Côtes d'Armor. Dossier contenant les archives de la Croix-Rouge de Saint-Brieuc. 1J250

Recensement de 1931 et 1936 à Saint-Brieuc, Archives 22

Site Généanet, famille Botrel, cliquer ici

L'histoire de Mme Étienne, militante pour le droit de vote des femmes, est à retrouver dans ce blog en cliquant ici

Acte de naissance Marie Botrel. Archives de la Sarthe

 

 

vendredi 9 février 2024

Les problèmes du commerce à Robien entre 1940 et 1945

 

1943. Annonce publiée dans Le Moniteur des Côtes-du-Nord 7 août 1943


Un commerce en berne

En juillet 1940, beaucoup de petites entreprises et de commerces subissent le choc de la défaite militaire car de nombreux hommes sont faits prisonniers. Quand c’est le patron qui est prisonnier, l’entreprise ou le commerce ferment définitivement. 

Les commerces sont confrontés à une paralysie des moyens de transport, à des difficultés de trésorerie et à la rareté de certaines denrées, parfois réquisitionnées. Le marché noir est aussi un handicap pour les commerces ayant pignon sur rue.

Autre problème, le pouvoir d'achat diminue dans le quartier pour tous les ouvriers qui sont licenciés comme aux Forges-et-Laminoirs (une centaine en 1941).

 

Des autorisations obligatoires

De plus, pendant l'Occupation allemande, le commerce est l'objet de nombreuses restrictions. Tout est soumis aux autorisations de l'administration. Il faudra quelques temps après la fin de l'Occupation pour que tout, ou presque, rentre dans l'ordre.

La liste qui suit est établie au regard des demandes de commerçants et artisans pour maintenir, agrandir ou reprendre leur activité entre 1940 et 1945 :

Mme Allié, 11 boulevard Hoche

Jean Barbey, 13 rue Albert Thomas, alimentation générale, 27 octobre 45

M. Bazin boucher, rue Jules Ferry, veut ajouter une activité de charcuterie, 1940

M. Bougeard, 10 rue Jules Ferry, se voit refuser de rouvrir son commerce de cidre, août 43.

Pierre Jouan, 49 boulevard Hoche, fruits et légumes, est autorisé à reprendre son activité le 12 mars 45.

Emmanuel Chuberre, 9 rue Ferdinand Buisson, artisan bobineur, 21 août 45

Yves Hellio, 24 rue de Robien, est autorisé à reprendre son activité dans le commerce de chevaux en juillet 45.

Morin Léon, 28 rue Aristide Briand, réparation de cycles, décembre 44

Le Bihan, 54 rue Jules Ferry, fournitures industrielles et agricoles, novembre 44

Daden François, 55 rue Jules Ferry passe au 2 rue du Pré-Chesnay, janvier 44

 

Annonce publiée en 1935 dans le bulletin paroissial de Robien

 

Poirier Barthélémy, 139 rue Jules Ferry, atelier plombier zingueur

Marcoletti, rue Louis Hélary, commerce de fabrication de menuiserie de bâtiment, août 44

Sévin Gaston, 12 rue Jules Ferry, photographe

Émile Lonangant, 60 rue Jules Ferry, fabrication pantoufles, octobre 45

Renouard, photographe

Flageul, boulevard Carnot, épicerie, conserves, charcuterie

Ranjouan Etienne, 19 rue de Robien, est autorisé à effectuer le montage de gazogènes sur automobiles, le 30 septembre 1940 (voir l'article sur les garages et sur Sambre-et-Meuse)

Louis Berges, 62 rue Jules Ferry, artisan menuisier-carrossier,  3 octobre 45


Joseph Redon, 32 route de Trégueux, 23 septembre 41, mécanique réparateur de cycles  et motos.

A noter que peu après 1945, Pierre Le Henaff, habitant 43 rue Alsace Lorraine,  est autorisé à construire une baraque en bois dans le boulevard Carnot afin d'y installer son atelier de menuiserie. (Permis de construire 2Mi, boite 1, archives municipales)

1943. Annonce publiée dans Le Moniteur des Côtes-du-Nord 7 août 1943


 

Les autorisations pour les ateliers de couture.

Quatre personnes du quartier de Robien ont obtenu de pouvoir travailler à leur domicile entre 1940 et fin 1944. Pour cela elles ont dû sollicité une autorisation.

Atelier Marguerite Amisse , 51 boulevard Paul Doumer, atelier de couture à façon, 1944


Atelier Marie Le Gall , 24 rue Zola, atelier artisanal, travail à façon octobre 44

Atelier de Mlle Jouan, rue Jules Ferry, décembre 44

Atelier Givord, 41 rue abbé Garnier, 21 mai 40.

H. Givord était l'ex-Maître tailleur du 71e Régiment d'Infanterie.

 
H. Givord. Archives municipales. 3L147

 

H. Givord. Archives municipales. 3L147

 

La Pharmacie Mahuzier, rue Jules Ferry

 

C'est vers 1945 que Georges Mahuzier va créer la première pharmacie du quartier de Robien, rue Jules Ferry.

Yves Georges Mahuzier est né le 30 juin 1905 à Saint-Brieuc, dans une famille où son père était parvenu à faire une belle carrière dans les impôts et il était devenu Receveur général des contributions directes à Rennes.

A St Brieuc, dès 1934, on trouve la trace dans Ouest-Eclair de

"Danet et Mahuzier, pharmaciens". Sans doute est-ce la première pharmacie tenue par Georges Mahuzier...

Plus tard, Georges Mahuzier ouvre sa pharmacie à l'angle de la rue Jules Ferry et du boulevard Hoche, dans le quartier de Robien mais décède, alors qu'il n'a que 40 ans, le jeudi 13 décembre 1945. Il est inhumé au cimetière Saint-Michel à St Brieuc.

La pharmacie Mahuzier est malgré tout mentionnée comme pharmacie de garde jusqu'en juillet 1946.

Le pharmacien Tirel  va reprendre, certainement fin 46 ou début 1947, l’officine de Georges Mahuzier, rue Jules Ferry. Jean Tirel est mentionné comme pharmacien à Rennes au moment où il se marie à St Brieuc avec Jacqueline Mury (publication du 13 juin 1946 dans Ouest-France). Ce mariage va coïncider avec son déménagement à St Brieuc et avec la reprise de la pharmacie.


Le fils du pharmacien de Robien, également nomme Georges est né en 1934. Il a fait des études de pharmacie à Rennes à partir de 1953 et a mené une brillante carrière, notamment au Liban de 73 à 75 puis comme professeur de chimie à la faculté de Pharmacie de Châtenay-Malabry jusqu'en 2001 où il prit sa retraite (sur l'île de Bréhat). Il avait une soeur nommée Josette. Il est décédé le 10 juillet 2014.

A noter que dans la famille Mahuzier, on trouvait Albert Mahuzier, né à Saint-Brieuc, célèbre explorateur, conférencier ayant fait les beaux jours des premières séances de Connaissances du Monde dans de nombreuses villes en France.


 

Sources

Autorisations pour les ateliers de couture et autres commerces : Archives municipales

Ouest-Eclair 1934

Ouest-France, 25 août 1945

Généanet, fiche sur Mahuzier père né en 1877, cliquer ici

Témoignage de Dominique Soufflet, habitant du quartier de Robien.

 

 

Ci-dessous l'emplacement de la pharmacie rue Jules Ferry

 

Photo des années 80-90

 


 

Si vous avez des commentaires, des témoignages ou des documents sur cette période, merci d'utiliser le formulaire de contact.

 

 

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Sources

 

Archives municipales St Brieuc, sous-série F commerce et industries

2F10.1 fonds de commerce, création, extension, transferts et autorisation 1865 ; 1939-1945

 

Le choc des années 20. Thèse. Christian Bougeard. Archives départementales 

 

Annonce publiée dans Le Moniteur des Côtes-du-Nord, 7 août 1943, dans le Fonds Salaün, 95 J 4 Archives départementales









 


jeudi 1 février 2024

Le lotissement des cheminots rue Cuverville, quartier de Robien à Saint-Brieuc

 

Au début des années 1900, les maisons de cheminots de la rue Cuverville formaient un petit lotissement le long de la rue qui surplombait la voie ferrée. Les cheminots n'étaient qu'à quelques minutes à pied de leur lieu de travail. 

Une maison de cheminots de la rue Cuverville surplombant la voie ferré. Photo RF


Les premières maisons
 
Toutes les maisons de cheminots sont construites sur des terrains appartenant à la compagnie des chemins de fer de l’État.
Dans le recensement de la rue Cuverville en 1911, on dénombre déjà 7 familles de cheminots. 
 
Dans les années 20, plusieurs permis de construire sont déposés. On remarquera que plusieurs techniques de construction sont utilisées (bois ou fibrociment). Les dimensions restent très modestes dans tous les cas, la plus petite fait dix-huit mètres carrés et la plus grande, une quarantaine de mètres carrés.

M. Albert Piqueau, ferblantier aux chemins de fer de l’Etat, fait une demande de permis de construire le 10 mars 1926 (2T9) pour édifier « un petit chalet en bois de 2 pièces sur un terrain des chemins de fer de l’État, 18 rue Cuverville. »

 

Archives municipales. 2T9

 

Archives municipales 2T9

 

Archives municipales 2T9

 


Le 2 avril 1928, M. Yves Brouder, employé aux chemins de fer de l’Etat à St Brieuc, habitant 10 rue Jules Ferry, sollicite l’autorisation de construire « une petite habitation de trois pièces, en fibrociment, rue Cuverville ». Le terrain appartenant aux chemins de fer est devenu la propriété de M. Brouder par adjudication. (2T9)

 

Archives municipales 2T9


Archives municipales 2T9


M. Picault, habitant 8 rue Notre-Dame, effectue une demande le 2 avril 1928 afin de construire « une maison en bois » rue Cuverville.


Archives municipales. 2T12


Archives municipales 2T12

 

 
Le lotissement est complet !
 
En 1936, on trouve quinze familles de cheminots, logées dans les petites maisons SNCF. 
Elles sont alors situées aux numéros 2, 4, 6, 8, 12, 14, 16, 18, 20, 22, 24, 26, 28, 30 et 32. 
 
Les noms de famille de ces employés des chemins de fer sont : Mallet, Foutel, Denis, Cléach, Lemoine, Réhaut, Le Ster, Le Hénaff, Ollivier, Le Gueut, Marric, Richer, Méléard, Frabolot…
 
 

La photo aérienne ci-dessous dévoile, au premier plan, une douzaine de ces maisons de cheminots le long de la rue Cuverville dans les années 40.

Photo aérienne années 40-50, Archives départementales.
 

 

Ventes des maisons au 14 et 28.

En juillet 1955, la S.N.C.F met en vente un baraquement au 14 rue Cuverville de 6 mètres sur 11 comprenant 3 pièces et un cellier avec une couverture en tôle ondulée.
 

L’opération est renouvelée en juin 1957 avec le baraquement du numéro 28 comprenant une cuisine, 1 chambre, 1 débarras et une toiture en carton bitumé. Le baraquement du numéro 30 est aussi mis en vente et comprend une entrée, une cuisine, 3 chambres, 1 grenier, doubles parois en bois, plafond et parquet en sapin, toiture en tuiles mécaniques. Démontage et enlèvement aux frais de l’acquéreur.
(Ouest-France 4 juillet 1955 et 17 juin 1957)

 
Annonce SNCF 17 juin 1957 Ouest-France

 

Le lotissement s'en va...

Yvonne Michel était une ancienne cheminote, elle est arrivée un peu après 1945 dans la rue Cuverville. Tout le monde était locataire de la S.N.C.F mais elle a eu la chance de pouvoir acheter le terrain de sa maison mais s’est battue longtemps pour y parvenir. Sa maison et celle de Joseph Prigent ont été les deux dernières à tenir debout.


Les pavillons jumeaux en pré-fabriqué sont la propriété de la S.N.C.F. Ils ont été agrandis et rénovés.
 

Robert Picault habitait à l’intersection de la rue Luzel, c’était un ancien mécanicien des chemins de fer. Il a connu les derniers temps des locomotives à vapeur. A la retraite, il n’a pas pu acheter le terrain sur lequel sa maison est bâtie et à sa mort la maison a été démolie, c’était la règle.

Plusieurs maisons inhabitées se sont écroulées dans les années 90 faute d'entretien et de consolidation, le fait de ne pas pouvoir devenir y était pour beaucoup. Ces petites maisons ont alors presque complètement disparu du paysage.

De nouvelles maisons poussent sur les emplacements libérés après voir été vendus.

L’annonce du décès de Joseph Legueut, à l’âge de 86 ans, est publiée le 7 janvier 1971, la cérémonie se déroule en l’église Sainte-Anne de Robien. On découvre dans l'annonce que ce retraité de la S.N.C.F habitait dans une baraque de cheminots au 22 rue Cuverville depuis les années 30. C'était un ancien combattant de 14-18 qui avait reçu la Médaille militaire et la Croix de guerre. 


La disparition de l'avant dernière maison

  

En mai 2010, l'outil Google Street proposait encore une vue de la maison de cheminots du 6 rue Cuverville avec un peu plus loin celle aux volets bleus au numéro 8.

 
Maison au 6 rue Cuverville. Image Google Street

En avril 2019, il ne restait que les fondations au numéro 6 !

 
Maison au 6 rue Cuverville. Image Google Street

Et en décembre 2020, plus rien ! Elle aurait disparu vers 2016...

 

Emplacement de l'ancienne maison au 6 rue Cuverville. Image Google Street

 

Le lotissement des cheminots aujourd'hui

 
De toutes ces maisons du lotissement, il n'en reste plus qu’une seule !


La dernière maison de cheminots du lotissement de la rue Cuverville. Photo RF

 

 

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Autres articles à consulter

 
Dans la rubrique "Habitat ouvrier à Robien et les lotissements ouvriers" :
 

 

Autres articles à consulter sur Les cheminots, la gare, la S.N.C.F

 
La Société Française et Entrepôts Frigorifiques (S.T.E.F), cliquer ici

Les cheminots de la paroisse de Robien et le syndicalisme catholique, cliquer ici

Les Résistants cheminots du quartier de Robien en 39-45, cliquer ici

La Cité des Cheminots", boulevard Paul Doumer, cliquer ici

Le lotissements des cheminots, rue Cuverville, cliquer ici 

Au nord de Robien, traverser la voie ferrée (ponts, passerelle), cliquer ici


 

Sources

 
Recensement 1911 et 1936, archives départementales
 
Photo aérienne, Fonds Henrard, Archives départementales, cote 26 Fi 358
 
Archives municipales, permis de construire 2T9, 2T12