samedi 19 août 2023

Traces de l'identité bretonne à Robien. Saint-Brieuc


 


Des sensibilités et des histoires personnelles

Depuis un siècle, les habitants de Robien ont éprouvé le besoin de marquer personnellement sur leur habitation l’empreinte de leur identité bretonne. 

L’identité bretonne est forte à Saint-Brieuc, il n’est donc pas étonnant que l’on retrouve ce marquage culturel à Robien.

Blanche Rousselet, habitante de Robien, vers 1910 (1893-1973)
Détail de cartes postales anciennes de Robien.

 

Chacun choisit, selon sa sensibilité et son histoire personnelle, ce qu’il va mettre en avant. Certains restent dans la symbolique avec le triskell, l’hermine, la croix celtique.

Ces motifs sont appliqués sur une porte d’entrée ou sur un portail avec de la ferronnerie, ou bien gravés dans la pierre. 

D’autres placent une statuette d’un saint breton dans une niche en façade (St Brieuc avec le loup, St Yves le patron des avocats…).
Mais ce que l’on voit le plus souvent ce sont ces petites plaques (en marbre pour les plus anciennes) avec un nom ou une expression en langue bretonne. C’est une affirmation individuelle, parfois de l’ordre de l’intime.
On y retrouve des références propres à la Bretagne qui rappellent les éléments comme le vent, la mer… 

 

Robien, un quartier accueillant de longue date pour la culture bretonne

21 février 1963. Le Télégramme. Fonds Salaün. Archives départementales

 

Dans un article du mardi 26 février 1963, titré « Le bal breton à Robien de dimanche », le journal Le Télégramme s’interroge : « Sommes-nous à la veille d’une nouvelle vague des bals bretons ? Telle est la question que l’on peut se poser en constatant le succès que connut le bal organisé par le Foyer culturel breton ».

Le journaliste poursuit en indiquant qu’après un excellent goûter, « place fut faite à la danse. Binious et bombardes, ou plus simplement chants, entrainèrent toute la jeunesse. Et quelle fraicheur ! Quel dynamisme ! Quelle vie ! ». Les présences de M.Erwan Ropers, secrétaire général de Kendalc’h et de M. Tostivint, professeur honoraire à Le Braz, sont signalées.

Pour parler du même événement, Ouest-France titre « Journée d’amitié du Foyer Oaled ab Herve, salle de Robien". La directrice du Foyer était alors Mme de Bellaing que l'on retrouvera bien plus tard, toujours en première ligne, pour la promotion de la culture bretonne.

25 février 1963. Ouest-France. Fonds Salaün. Archives départementales

 

A propos de la langue, on peut noter que dans le quartier de Robien, la langue régionale tient une place importante, comme en témoignent la présence de l'école Diwan, créée en 1979 et depuis 1986 à Robien, et celle du Centre culturel breton Abherve, implanté depuis 1997 (avec des panneaux indicateurs bilingues).

Rue Jules Ferry, St Brieuc

Dans les années 90, le bagad de Saint-Brieuc répète dans la maison de quartier de Robien et des cours de bombarde, batterie écossaise et cornemuse sont donnés une fois par semaine (Le Griffon 1997 numéro 139).

Le Griffon numéro 139. Archives municipales

 

Les noms de rues

Les noms de rues qui évoquent la culture bretonne ne sont pas absents dans le quartier, citons Anne de Bretagne (duchesse de Bretagne et reine de France), François-Marie Luzel (collecteur de contes et chants bretons), Paul Le Flem (compositeur inspiré par la Bretagne), François Menez (écrivain et journaliste breton)...


Paul Le Flem, compositeur. Photo Le Griffon



Enfin, on remarque que ces références bretonnes, liées à l'habitat, se retrouvent en grand nombre dans les maisons construites dans les années 30 pour les maisons de style néo-breton. Cette période et ce style mettaient en avant le régionalisme. L’époque contemporaine est également riche en signes bretons, signe d'un regain d'intérêt porté à cette culture.

 

Petit florilège de l'empreinte bretonne à Robien, rue par rue (une cinquantaine d'exemples !) 

Regardez bien autour de vous, il y en a sans doute autant qu'à Robien !

Cet article est une invitation à scruter les maisons et à essayer de décrypter leur charme et à trouver ce qu’elles ont d’unique.

 


Rue du Pré-Chesnay
Numéro 9 plaque : Va Neiz bihan, Mon petit nid.



Numéro 11 plaque : Ty an Avel, Maison du vent



Numéro 14 plaque : Ker Bugalic, Maison du petit enfant 



Numéro 43 : War an uhel, Sur le haut.
Ce portail en fer forgé a été commandé par les premiers propriétaires M et Mme Lefur qui étaient très attachés à la Bretagne. 


Numéro 49 : statuette de St Yves (St Yves est fêté le 19 mai, jour de la fête de la Bretagne)

Cette maison a été construite en 1943 par des personnes très pieuses. 


"Placer sa maison sous la protection d'un saint patron est une évidence des Bretons. Rapportées ou incorporées dans le mur, ces niches sont régulièrement agrémentées de bouquets de fleurs".  

L'âme des maisons bretonnes. Editions Ouest-France

 

Numéro 53 : numéro de la maison avec un triskell de part et d'autre




Numéro 67 : statuette de Sainte Anne (Sainte Anne est fêtée le 26 juillet, c’est la Sainte patronne de la Bretagne et la patronne de la paroisse de Robien)




Rue du Tertre Marie-Dondaine

Numéro 46 : Ker Anna (c'est le prénom d'Anna Marquer, l'habitante de la maison)


Rue Luzel

Numéro 56 plaque : motif avec un bateau breton traditionnel, le Grand Léjon (céramique d’Étienne Hück, potier au Légué).
Ce bateau a été construit entre 1988 et 1992 à la demande de l’association pour Le Grand Léjon et il a été mis à l’eau en mai 1992 au port du Légué.



Numéro 37 bis : triskell




Numéro 39 : porte avec des motifs comme sur les lits clos




Numéro 49 plaque : Kan Avel, Chant du vent


 
Rue du Coucou

Numéros 4 et 6 : au niveau des épis de faitage, deux hermines et un triskell
C’est M. Rouxel, le propriétaire qui a fait réaliser ces épis de faîtage par Joël Babey un artisan de Plouha en 2007.

Photos RF 2020
 
Photos RF 2020

 

Toujours dans la rue du Coucou : Ker Roger



Rue de l’Ondine

Numéro 56 peinture sur ardoise (années 2010) avec maison bretonne aux volets bleus de l’île de Houat dans le Morbihan, un endroit particulièrement aimé par la propriétaire des lieux. 




Numéro 58 peinture sur ardoise (années 2010) avec maison bretonne


 

Avenue des Tilleuls

Numéro 1 plaque : Ker Ste Thérèse



Rue Jules Ferry

Numéro 70, plusieurs auges en pierre comme on en trouve dans les fermes bretonnes.




Numéro 141, plaque avec un bateau breton traditionnel, le Grand Léjon (céramique Etienne Hück)


Boulevard Hoche

Numéro 18 auge en granit




Numéro 26 : Roc Bihan.

Le nom du foyer Roc Bihan renvoie à l’origine du nom de Robien (Roc’h bihan = petit rocher)


 Numéro 44 : Ty Mam Goz (maison de grand-mère)


Numéro 89 plaque Ty bihan (petite maison)


 Numéro 96 :  Ker Pierric



Rue de Robien

Numéro 1 motifs celtiques sur les ferronneries

 



Numéro 4 plaque : Ker Men, Maison en pierre


 
Rue Aristide Briand

Numéro 15 plaque : Sked an heol, Rayon de soleil




Numéro 16 portail avec motifs celtiques (imaginé par Didier le Buhan) Les motifs stylisés ont été mis en valeur par le travail de ferronnerie réalisé par un artisan. Les thèmes représentés sont liés aux trois éléments : air, eau, feu. Tout à fait à droite, un motif évoque les gorges de Toul-Goulic (entre Trémargat et Lanrivain).




 
Rue Condorcet

Numéro 46 : petite plaque en céramique avec une hermine

 
Rue Albert Thomas

Numéro 3 : croix celtique sur une entrée de l’école Ste Bernadette (différente de la croix de l’église catholique romaine)



Numéro 5 : saint breton




Numéro 14 plaque : Ker Annick (Ce nom est lié au salon de coiffure qui se trouvait autrefois au rez-de-chaussée  et qui était tenu par Annick Le Bail)


Annonce parue dans Le Moniteur des Côtes-du-Nord 7 août 1943

 
 
Rue Abbé Garnier

Numéro 29 panneau : Laz bleuenn, Très fleuri 




Numéro 41 plaque : Ker Avoel, Maison du vent



Rue Bir Hakeim

Numéro 9 plaque : bateau breton traditionnel, le Grand Léjon (céramique Etienne Hück)




Numéro 12, plaque : Ker Josette




Numéro 31: motifs géométriques sur les ferronneries de porte


 
Boulevard Jean Macé

Numéro 5 plaque : Min ma Bro, Pierre de mon pays.
La personne qui a fait construire la maison était propriétaire d'une carrière de granit à Perros-Guirec. Elle était très attachée à la Bretagne et à ce coin du Trégor qui a fourni la pierre de bien des maisons du quartier, d'où ce nom de "Pierre de mon pays".




Numéros 9 et 11, statuette dans une niche.
Cette maison néo-bretonne exceptionnelle a fait l'objet d'une description détaillée.



Rue Louis Blanc

Numéro 15 plaque : Hiboud an Aven, Murmure du vent (la plaque est cachée par une haie)

Hiboud an aven. Photo RF 2022



 
Rue Chapelain de la Ville Guérin

Numéro 26, peintures extérieures de 1977 sur la maison qui était celle où vécut André Coupé jusqu’en 2009. André coupé était très inspiré par la Bretagne. Il ne parlait pas breton mais les deux thèmes de sa peinture murale font référence à l’Armor et l’Argoat. Ils sont appelés : « Beteg ar mor braz » (Jusqu'à l'océan) et « Dreist al lann » (à travers la lande).

Beteg ar mor braz. Photo RF 2020

 
Rue Anne de Bretagne
Numéro 12, plaque : Ker-Eole (Maison du soleil)

Numéro 46, hermine


Boulevard Paul Doumer

Entre le numéro 1 et le numéro 3, plaques de ciment ajourées séparant deux maisons avec le motif de l'hermine.


 
Rue de Trégueux

Numéro 20, rue de Trégueux, plaque avec le nom de la maison "Ker Joëlle"

 

Autres articles à lire sur le sujet sur ce blog

 

Les maisons néo-bretonnes et néo-normandes, cliquer ici

 

L'histoire de l'école Diwan à Robien, depuis 1986, cliquer ici

 

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Sources

Promenades et enquêtes dans le quartier entre le 13 et le 23 avril 2020 (Période très propice aux déplacements très courts pendant cette période de confinement !). 

La photo de Blanche Rousselet (1893-1973) a été aimablement envoyée par sa petite fille Chantal Le Calvez.

Toutes les photos sont prises dans le quartier de Robien. Photos Richard Fortat

Entretien avec Didier Le Buhan pour la traduction des noms, du breton au français. 

Articles de Ouest-France 25 février 1963 et du Télégramme 21 février 1963. Fonds Salaün. Archives départementales.


 

 

mardi 4 juillet 2023

Le lotissement des Forges-et-Laminoirs, boulevard Carnot à Saint-Brieuc. 1939

  

 

1939 Maison des Forges-et-Laminoirs


 

La politique de logement aux Forges-et-Laminoirs

Dès 1921, des logements sont construits par la direction pour les ouvriers des Forges (Archives départementales 109J14).

A la fin de l’année 1938, un document fait état du projet de logements des Forges-et-Laminoirs :

« La société des Forges-et-Laminoirs de Bretagne a entrepris la réalisation d’un programme de maisons ouvrières dans le but de lutter contre les taudis et de loger ses ouvriers dans de meilleures conditions d’hygiène.

La société des Forges-et-Laminoirs de Bretagne accordera à ses ouvriers la jouissance de ces maisons, moyennant une indemnité mensuelle variant de 20 à 60 francs par temps de présence et pour les charges de famille des ouvriers, aucune retenue n’est ponctionnée sur les salaires.
La première tranche de 6 maisons a été réalisée par ses propres moyens de financement. Une prochaine tranche de 12 maisons doit voir le jour.
 »

Archives départementales. 109 J 35

 

Un nouveau lotissement en 1939

Le 24 novembre 1939, la Société des Forges-et-Laminoirs de Bretagne et du Bourget, sollicite l’autorisation de construire une série de dix maisons ouvrières.

 


 

C’est l’entreprise de M. Yvon Scotta, successeur de l’entreprise Zocchetti, qui est chargée de ce chantier sur des terrains du boulevard Carnot, tout près de la maréchalerie de l’usine.

 



Plan d'ensemble du lotissement. Archives municipales

 

La photographie aérienne ci-dessous permet de se repérer dans le quartier de Robien après-guerre. On a :

Les bâtiments des Forges-et-Laminoirs (détruits et remplacés de nos jours par la Caisse Primaire d'Assurance Maladie)

Les 10 maisons dont les premières de chaque rangée sont mentionnées avec le signe *

Les maisons des contremaitres, avec celles qui bordent la rue Luzel, en haut de la photo, et les trois autres sur le bord de ce qui est de nos jours le boulevard Vauban (pas encore tracé après-guerre)

 

Photo aérienne 1947. Archives municipales

 

Les plans du lotissement sont déposés, visés par le Directeur des travaux de la Ville et le permis de construire est accordé par la Mairie de Saint-Brieuc.

 

Plan. Archives départementales

 


Les dix maisons sont de taille modeste, sans étage, elles possèdent un petit sellier et des toilettes à l’intérieur.

 

Plan d'une maison du lotissement. Archives départementales


 

 

Les Forges-et-Laminoirs n'en sont pas à leur première construction, cette entreprise a fait construire dans le quartier de Robien, immédiatement avant-guerre, une centaine de logements ouvriers avec de petits jardins.

 

Qui y habitait ?

Dans la population du boulevard Carnot en 1936 (Recensement 1936 Vue 60), on trouve de nombreux ouvriers des Forges : au numéro 49, Marcel Gallouet, employé de bureau et Gabriel Devigne, fondeur. Au numéro 51, Alphonse Burniaux, forgeron; Roger Fürhrmann, lamineur; Pierre Sauzéat, manœuvre ; Lucien Sauzéat, fils, tourneur. Au numéro 53, David Peyre, électricien ;  Au numéro 55, Ernest Rass, contremaitre ; Au numéro 57, Jean Toqué, gardien.

Du « côté pair », on a onze travailleurs logeant à la même adresse, plusieurs sont venus de l'étranger : Paul Corack, manœuvre ; Albert Cosson, lamineur ; Léon Lucas, manœuvre ; Georges Trautmann (né dans la Sarre), manœuvre ; Oscar Lecoq, rattrappeur ; Ali Hamed Ben Barech (né au Maroc), manœuvre ; Hamed Ben Barech (né au Maroc), manœuvre ; Jean Odintzeff (né à Parlossk en Russie) ; Stephan Belak (né à Voyka) ; Casimir Gorniack (né en Pologne) ; Maurice Hachemis (né à Alger). 

Rue Luzel, on a aussi Nicolas Soroka, lamineur, né en 1905 en Pologne ; Ernest Maday, lamineur, né en 1915 en Hongrie, Louis Jaran, monteur électricien, né en 1885 en Suisse.  

En 1931, de nombreux travailleurs des pays de l'Est de l'Europe apparaissent également dans le recensement du boulevard Carnot où ils travaillent tous aux Forges-et-Laminoirs. Les approximations et erreurs de transcription de l'agent recenseur doivent être nombreuses mais cette liste est néanmoins intéressante : Ahmed Barech, 1894, Marocain ;  Ben Ali Barech, 1892 à Sousse, Marocain (ou Tunisien puisque Sousse est en Tunisie) ; Oscar Amed, 1898, Maratuil ; Oscar Lecoq, né en 1894 à Louvryl (ou Louvroil, une ville du Nord avec une forte tradition dans la sidérurgie), Belge ; Vincent Gorniack, 1888, Octelle, Polonais ; André Kadéralec, 1898, Mochow, Tchécoslovaque ; Stanislas Kerskinsky (ou Krzesinski ?), 1905, Uzorziju, Russe ; Antoine Moraviak, 1894, Konzyan, Polonais ; Jean  Odintzeff (ou Medintzeff ?), 1898, Parlossk, Russe ; Michel Palavoyky, 1890, Kortj, Polonais ; Jean Stanoviski, 1894, Michalof, Polonais ; Vincent Szalasky, 1900, Michadou, Polonais ; Georges Simonoff, 1898, Odessa, Russe.

Alors, et ce n’est encore qu’une interrogation, trouvait-on certains de ces travailleurs dans les maisons ouvrières construites sur le terrain des Forges ?

 

Sur la photo aérienne ci-dessous, en bas à gauche, on aperçoit les petites maisons du lotissement des Forges-et-Laminoirs.

 

Photo aérienne. Fonds Henrard. Archives départementales.

 

La vie dans ce petit lotissement

On sait peu de choses sur la vie dans cette petite cité. Le 20 décembre 1948, le conseil d’administration de la Société de Secours Mutuel des Forges-et- Laminoirs se réunit, plusieurs habitants du quartier de Robien en sont membres : président, François Urvoy, 52 rue Luzel ; vice-président Julien Bommersbach, 52 rue Béziers Lafosse ; Roger Bernard 13 rue Emile Zola. Dans le compte-rendu, on peut lire que la réunion s’est tenue « à la baraque des polonais ».

Sachant qu’il y avait des polonais et russes dans les travailleurs cité plus haut, est-ce que c’était une manière de désigner ce petit ensemble de maisons ?

 

Années 40. Le lotissement est sur la gauche de l'image.



 

La disparition de ce lotissement

De nos jours il ne reste aucune trace de ces dix maisons. Il est difficile de déterminer exactement en quelle année elles ont été détruites. Par contre on sait qu'à proximité, la destruction de certains bâtiments comme les bureaux, les vestiaires, les magasins, les armatures, une partie du parc matières premières, était déjà achevée en 1974.

On peut se faire une idée du type de maison ouvrière de cette époque en observant ici et là, dans le quartier de Robien, celles qui sont encore habitées de nos jours.

 

Maison ouvrière rue François Merlet, quartier de Robien

 
Maison ouvrière rue François Merlet, quartier de Robien



Le parc immobilier des Forges-et-Laminoirs

 

Le 17 septembre 1956, dans un document, la société des Forges-et-Laminoirs de Bretagne fait le point sur sa politique de logement.

« Les logements ont été construits pour fixer une main d’œuvre, en l’occurrence 300 ouvriers. En 1956, 90 ouvriers et employés sont logés par la société. Lors d’un décès, la famille reste dans le logement ».

Au total, en plus des maisons éparpillées dans le quartier de Robien, trois cités ont été construites : une cité de 10 maisons avec jardin, une cité de 5 maisons avec jardin et la cité Maréchalerie de 10 maisons de 3  pièces avec jardin.

 

Petit à petit, au fil du temps, ces maisons seront louées ou vendues à des personnes n'ayant plus aucun rapport avec l'entreprise. Le lotissement de 10 maisons sur le site de l'usine sera détruit.

 

 

 

D'autres articles dans ce blog évoquent les petits lotissements ouvriers de Robien

 


 

 

 

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Sources

 

Dossier 2 T 53 Archives départementales, le même dossier est également aux archives municipales (numéro 1079)

 

Photo aérienne, agrandissement d'une photo de 1947 des Archives municipales, référence 6 Fi 4282

 

 

 

 


Édouard Prigent, homme politique et de culture, 5 rue de l'Ondine, quartier de Robien à Saint-Brieuc

 

Portrait d’Édouard Prigent 1919-1992
 


Édouard Prigent

Édouard Aimé Marie  Prigent est né le 20 mai 1919 à Kerverbel en Saint-Martin-des-Prés (22) où son père était couvreur.

Prigent. Acte de naissance. 1919


Il fait ses études au Lycée Anatole Le Braz à Saint-Brieuc puis à la Faculté des Lettres de Rennes. Il est mobilisé et fait prisonnier en juin 1940, s'évade puis est repris.

Démobilisé, il enseigne à Valognes dans la Manche à partir d'octobre 1943. C'est là qu'il rencontre Étiennette Rilliot avec laquelle il se marie le 22 février 1945 à Boutteville, dans la Manche.

Le couple décide de s'installer en Bretagne, un retour pour Édouard Prigent qui est nommé à Saint-Brieuc en octobre 1945. Il prend une année de congés pour passer l'agrégation de grammaire à laquelle il est reçu second en 1947.

Enseignant de Français aux Lycées Le Braz, Renan et Rabelais, il aura formé des centaines de jeunes briochins pendant ses 35 années de carrière avant de prendre sa retraite en juin 1977. 

25 juin 1977 Ouest-France

"Celui que ses élèves appelaient affectueusement "Doudou" reste dans la mémoire de nombreux briochins. Claude Saunier, ancien maire de la Ville, est l'un d'eux. Il se souvient particulièrement du cours qui a suivi le décès de l'acteur Gérard Philippe... Tous gardent en mémoire l'attention extrême qu'il leur portait. "Ce qu'il nous a appris, c'est la rigueur de la pensée, la limpidité de l'expression". Reste aujourd'hui le souvenir de sa modestie, de sa sensibilité, de sa profonde humanité." (Extraits de l'édition de Ouest-France du 3 mars 1992)

 

Edouard Prigent. Photo Ouest-France

 

Le jeudi 13 février 1992, Édouard Prigent avait programmé bien à l'avance, à la Maison du Peuple, une conférence sur l'histoire des rues de Saint-Brieuc. Mais, hospitalisé pour être soigné d'une angine de poitrine, ce projet n'aboutit jamais et c'est le 14 février 1992 à Saint-Brieuc que s'éteint Édouard Prigent à l'âge de 72 ans.

 

Édouard Prigent, un homme engagé

Édouard Prigent était une figure locale, connu pour son engagement au Parti  communiste dont il est membre de la direction départementale de 1948 à 1962.

C'est donc sous l'étiquette communiste qu'il se présente à plusieurs élections comme par exemple aux cantonales de mars 1949, d'octobre 1951, d'octobre 1958 et de juin 1961. 

Il devient conseiller municipal dès 1947 et jusqu'en 1977, on le retrouve la plupart du temps adjoint au maire de Saint-Brieuc.

Il est également maire par intérim après le décès d’Antoine Mazier de décembre 1964 jusqu'aux élections de mars 1965. 

Au moment de son décès en 1992, le Parti Communiste  organise une cérémonie à la Maison du Peuple, un lieu qu'il affectionnait particulièrement.

La Ville de Saint-Brieuc, de son côté, a voulu lui rendre hommage en donnant son nom à un boulevard en 1992. 

3 mars 1992 Ouest-France

L'inauguration de ce boulevard partant de la Croix-Mathias est malheureusement ternie par l'absence de Mme Prigent qui n'avait été invitée ni à la séance du Conseil municipal sur le sujet, ni à l'ouverture du boulevard.

24 décembre 1992. Ouest-France

Cette "bévue" de la municipalité a causé un certain émoi dans le quartier de Robien ainsi que de la colère...

26 décembre 1992 Ouest-France

Les excuses de la municipalité n'y changeront rien...

 

Plaque du boulevard Edouard Prigent à Saint-Brieuc. Photo RF 2023

 

Édouard Prigent, homme de culture

Édouard Prigent était un professeur et un homme de culture qui donnait des conférences pour partager sa passion de la littérature : "Saint-Brieuc dans l'oeuvre de Louis Guilloux" 1957, "La littérature et la mer" 1960, "Le surréalisme", "Georges Palante"...

E. Prigent 8 novembre 1990 Ouest-France

Édouard Prigent est un spécialiste de l'oeuvre de Louis Guilloux dont il avait découvert La maison du Peuple, en classe de Seconde grâce à son professeur au Lycée Le Braz. En 1935, il ne manque pas la sortie de Le Sang Noir

Quand il revient à Saint-Brieuc en 1949, il se met à lire les autres ouvrages de Louis Guilloux et propose une conférence sur "Saint-Brieuc dans l'oeuvre de Louis Guilloux". L'écrivain n'est pas présent mais son épouse et sa fille sont dans la salle. "Dès le lendemain, il m'attendait à la sortie du Lycée. Ce fut le début d'une amitié qui dura jusqu'à sa mort. Je le voyais assez souvent quand il n'était pas à Paris. Il me téléphonait. Il parlait de ses projets et des évènements. Il était très préoccupé par la guerre, la crise, la guerre froide, l'Indochine, l'Algérie. Il était assez désespéré devant ce qu'il concevait comme des échecs de l'humanité pour parvenir à un monde meilleur." raconte Édouard Prigent.

22 janvier 1957 Ouest-France

 

Édouard Prigent a publié plusieurs ouvrages dont celui sur   Louis Guilloux en 1972 aux Presses Universitaires de Bretagne. Cet ouvrage de référence a inspiré bien des auteurs par la suite.


Un autre ouvrage intitulé Les rues de Saint-Brieuc chantent la Révolution a été publié en 1989.


Édouard Prigent y recense une quarantaine de rues, boulevards ou places ayant trait à la Révolution de 1789.

Le premier outil de travail d'Edouard Prigent : le plan de Saint-Brieuc.

C'est un livre conçu pour pouvoir déambuler dans les rues, un plan à la main, tout en faisant un bond dans l'histoire passée. Cette promenade est illustrée par des documents des Archives municipales.

12 et 13 août 1989. Le Télégramme


Édouard Prigent avait aussi des talents de conteur. Très sensibilisé par les contes populaires, il mettait sur le même plan le Français, le Breton et le Gallo.

 

Document

En 1949, la Municipalité de Saint-Brieuc décide de supprimer sa subvention pour la saison lyrique. Édouard Prigent monte au créneau, en tant que Conseiller municipal d'opposition, dans une tribune libre dans le journal du Parti Communiste, L'Aube Nouvelle (18 juin 1949). Extraits :

"On sacrifie le théâtre lyrique ? Et pourquoi pas les pelouses, les jardins, la bibliothèque et les congés payés? ... On objecte les difficultés financières de la cité ? Et les difficultés des artistes et des professionnels du théâtre ?... C'est ainsi que l'on organise en France une crise de l'art dramatique qui est une attaque à la Patrie et à sa grandeur...

Une fois de plus apparaissent, de façon criante, les méfaits de cette politique qui tend à l’abrutissement de la nation."

 

Édouard Prigent à Robien

Au 5 rue de l’Ondine, on peut alors apercevoir une maison de style néo-normand avec un mélange de faux pans de bois en béton peint et de pierres apparentes en granit rose : c’est la maison qu'ont fait construire M et Mme Rilliot en 1937, beaux-parents d’Édouard Prigent. C'est là que ce dernier choisit de venir habiter avec sa famille en 1953.

Maison Prigent 5 rue de l'Ondine. Photo RF

 Edouard Prigent dans son bureau. Photo Gilbert Coutelier. Bretagne Plus

Dans le quartier de Robien, Édouard Prigent a pris une place importante en 1949 dans la lutte des lavandières du Carpont. (article à retrouver en cliquant ici ). Sur le même sujet, avec le Docteur Rahuel, il a interpelé très concrètement les élus sur la qualité de l'eau au niveau du Moulin au Chaix. Leurs habitants "ont rempli quelques bouteilles avec cette eau nauséabonde, et plusieurs membres du Conseil municipal, invités à mettre leur nez dans le goulot, n'ont pu supporter sans défaillir, de respirer plus d'une bouffée de ce liquide infect." (Ouest-France 18 juin 1952)

Édouard Prigent a été par ailleurs le Président de l'Association des Parents d'élèves des écoles de Robien dans les années 60. Cela lui permettait d'être au plus près des préoccupations quotidiennes des habitants comme on le découvre dans le compte-rendu d'une visite effectuée par M. Poupard, maire de Saint-Brieuc, à l'école de filles et à la maternelle de Robien. Édouard Prigent, en tant que Président, Louis Cabon, secrétaire et Mmes Daoulas et Lavanant, du bureau, ont pu à cette occasion faire entendre leur suggestions et revendications. (Ouest-France 5 février 1960)


Sources

Photo et informations du site Le Maitron, excellent site sur le mouvement ouvrier et social.

Articles de Ouest-France, 22 janvier 1957, 22 décembre 1960, 25 juin 1977, 13 juillet 1989, 8 novembre 1990, 19 février 1992, 3 mars 1992, 24 et 26 décembre 1992.

Article du Télégramme, 12 et 13 août 1989.

Entretiens et correspondances avec Christian Prigent.

 

A consulter

L'histoire du Parti Communiste à Robien, cliquer ici

Christian Prigent, écrivain, cliquer ici

 

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