samedi 9 novembre 2024

Les combats de catch dans la salle de Robien à Saint-Brieuc. 1957-1977


Le catch à Saint-Brieuc

Le premier gala de catch à Saint-Brieuc est organisé par le Sporting-Club Briochin le samedi 3 mai 1947 : « de l’inédit à des prix raisonnables malgré les frais élevés qu’occasionne un tel spectacle ».  (Ouest-France 18 avril 1947)

Le 2 août 1947, un grand tournoi international de catch dont l’organisateur est toujours le Sporting-Club Briochin va voir s’opposer plusieurs vedettes dans la salle Duguesclin à Saint-Brieuc : Manuel, un combattant puissant ; Géo Freymond, le champion de France, « un magnifique athlète au jeu fin qui exclu toute brutalité » ; Aslan, appelé L’étrangleur, qui a participé à la finale du championnat d’Europe où il a été battu par le Suisse Zwalen ; Gabriel Laurrier, champion de France en 1945, « un ancien déporté qui a passé quatre ans en camp de concentration en compagnie de quelques Briochins. Sa constitution robuste lui a permis de résister à toutes les souffrances et de compter aujourd’hui parmi les meilleurs Français de sa catégorie ». Les lutteurs ne se feront aucun cadeau. (Ouest-France 2 août 1947)

En juin 1954, dans la salle du C.O.B, transformée avec ring et gradins, se déroule pour la première fois un combat international de catch féminin. Trois combats seront proposés avec des vedettes du ring. Cette manifestation s’inscrit dans le cadre des festivités sportives organisées avant le passage du tour de France cycliste à Saint-Brieuc.

 

Le catch à Robien

Le catch était très populaire dans les années 50 et l'ouverture de la salle de Robien en 1956 correspond exactement à cette grande vogue...

Dès le 23 février 1957, Ouest-France annonce un premier gala de catch dans la salle de Robien, organisé par le Vélo-Sport Briochin. Les spectateurs s'y pressent pour apercevoir des têtes d'affiche des soirées de catch à la Télévision.


« Le combat Charron-Bernaert sera le point culminant de cette réunion, car tout le monde sait que l’ex-champion de boxe est le plus « charognard » des catcheurs. » (Charron était appelé "La patate" quand il était boxeur.)

"Un choc sensationnel mettra aux prises l'ex-champion de boxe Robert Charron et le terrible belge Pierre Bernaert. Le terrible indien Inca, Peruano, champion d’Amérique du sud, rencontrera le scientifique champion de France Henri Lambert. Le rapide breton Henri Le Mao réceptionnera le souple champion de Paris, l'international Jetty Coster, tandis que le sournois Moïse Besch sera chargé de créer l'ambiance face à Jacques Coudert." (20 février 1957 Ouest-France)

Robert Charron, boxeur, photo Boxe-Time
 

En mars 1957, le gala de catch dans la salle de Robien n’emporte pas complètement l’adhésion du public puisque la salle n’est qu’à moitié remplie : "L’ambiance n’eut pas à souffrir du manque de spectateurs. Ceux-ci (environ 800) firent du bruit comme 3000, créant l’ambiance indispensable à une telle soirée".

Le spectacle était de qualité d’après le compte-rendu de Ouest-France et le Comité des Cols bleus des Côtes-du-Nord avait bien fait les choses.

Notons le combat de Asselin contre Laroche : « Deux superbes gaillards qui firent admirer leur souplesse. Clés aux bras et aux jambes, étranglements, ciseaux au corps ou à la face, manchettes, bref, toute la gamme du vrai catcheur y passa. Laroche eut le tort de s’en prendre à l’arbitre. Celui-ci ne badina pas et renvoya le bouillant gitan dans son coin».

D’autre part, Von Chenok, le champion d’Allemagne gagne contre Lambert, le champion de France : « Von Chenok n’a pas volé son nom d’étrangleur ». (D'après l'édition du 18 mars 1957 de Ouest-France)

 

1959

Le 14 mars 1959 : "Une manifestation de catch qui s’annonce particulièrement fertile en drames et en émotions se déroulera ce soir à Robien. Le choc principal du gala mettra aux prises l’ex-pugiliste, le populaire Laurent Dauthuille, au dangereux Italien Serge Reggioro…"

L’Helvétique René Gerber rencontrera l’officiel champion du monde des poids légers, le Bourguignon Jean Rabut, véritable phénomène du catch aérien et acrobatique.

Ci-dessous, photo du catcheur Jean Rabut 

Jean Rabut.14 mars 1959 Ouest-France


1959

Le 29 avril 1959, à l’affiche : Gilbert Leduc, le catcheur le plus populaire contre Jacques Ducrez, plus connu sous le nom du Bourreau de Béthune, tout de rouge vêtu (photo ci-dessous).

Le bourreau de Béthune en costume

Toujours en avril 59, on peut assister dans un autre combat à la confrontation entre le sympathique champion d’Europe Claude Montourcy et le matraqueur européen numéro un, Robert Gastel.

"Le martin-pêcheur Lorientais", la grande révélation de l’année, Jean Corne, rencontre le sympathique Roberto Ricetti, champion d’Italie.

 

1959

Gala de catch à la salle de Robien le samedi 26 septembre 1959 avec en vedette Jean Corne, le breton et champion de France opposé au jeune Santelli. D’autre part, Gaby Calderon ira à l’assaut du Bourreau de Béthune qui ne voudra pas décevoir après ses deux cent victoires.

A suivre aussi Géo Géret (appelé Barbe Rousse), vedette du catch à la télévision, contre le Polonais Yanneck Frysiuk (Jean Frysiuk).

Claude Montourcy, champion d’Europe va essayer de venir à bout de José Tarres, le poids-lourd espagnol surnommé « La Tête de cheval ».

Jean Frysiuk

1960, le catch féminin

Le samedi 7 mai 1960, le catch féminin est à l'honneur avec Léa Dewaert, championne de Belgique ; Caroline de Beaumont, championne de France ; Maria Apolski, championne Polonaise. 

Caroline de Beaumont était appelée "Lady Caroline" ou "La Lady du catch" ou encore "La catcheuse écrivain" !

Du côté masculin, on note aussi la présence de Quasimodo, « l’affreux sonneur de Notre-Dame ».

Catch à Robien. Annonce 30 avril 1960 Ouest-France

 

Léa Dewaert, la blonde

 
Au centre Dewaert et Caroline de Beaumont

Caroline de Beaumont


La catcheuse Lola Garcia

 

1961

Le 7 novembre 1961, se tient un grand gala de catch à Robien avec de nombreux champions.

Au programme un match à quatre, par relais, une formule venue d’Amérique qui fait fureur.

Les Italiens Sergio Reggiori et Giacomo Guglielmetti vont affronter les Français Corn et Laroche.

On verra aussi Jean Bout, le champion du monde des mi-lourds, contre le Belge Jacques Van Dooren et Al Gamain affrontera le Sud-Américain Manclo Aguilar.

Enfin, le roi de la voltige, Jean Rabut, ex champion du monde, rivalisera avec Moussa Guechichi.

Catch à Robien 7 novembre 1961 Ouest-France

Des années ont passé après le dernier grand gala de catch de novembre 1961 et le catch est moins en vedette. Les galas de catch ne sont plus organisés avec la régularité observée dans les années 60 mais à titre exceptionnel, pour des soirées caritatives extraordinaires.

 

1973

Gala de catch à la salle de Robien en mars 1973, au profit des Associations sportives des handicapés physiques.

Au programme, quatre combats dont un match à quatre, féminin.

L’attraction de la soirée est la venue de Klondyke Bill qui annonce 208 kilos ! Le programme comporte également une démonstration haltérophilie avec Daniel Hardy, un athlète handicapé qui tentera de battre son record de France avec 135 kilos en développé couché.(Ouest-France 2 mars 1973)

 

1976

En février 1976, l’association des policiers briochins organise un gala de catch avec Zarak, bien connu pour sa cagoule rouge et jaune ornée d'un Z.

Zarak

1977

En 1977, un grand gala de catch est proposé au profit des œuvres sociales de l’Amicale de la Police.

« Pour cette soirée, l’amicale de la Police a fait appel à quelques-uns de ses catcheurs, et même des catcheuses, les plus connus.

On verra ainsi Mammouth Siki qui, à l’âge de 16 ans fut sacré Champion de Guadeloupe avant de faire carrière aux USA"… 

Le clou de la soirée sera le match à quatre : les Celtes, opposés aux Parisiens. Il y aura aussi un combat de femmes entre l’espagnole Lola Garcia et la française Brigitte Born.


1994

Catch 21 juin 1994. Ouest-France

En juin 1994, un gala de catch réunit 600 personnes dans la salle de Robien. L’association française des sclérosés en plaques qui organise cet événement souhaite alors renouer avec la tradition du catch mais le public ne viendra pas aussi nombreux que les organisateurs l'espéraient. 

Le catch fait moins recette, pourtant le spectacle est toujours au rendez-vous :

 « Qui n’a pas vu Yann Caradec, Le Breton volant, surgir de l’obscurité drapé dans une cape aux couleurs du drapeau breton n’a rien vu. Et le noir Canon-ball, le Barbare du ring, un franco-américain de 152 kilos, n’a pas déçu les amateurs de vrais méchants.  Passons sur The Hell Raiser, un masqué inconnu ressemblant trop à Casimir qui aurait trop mangé de Gloubiboulga, pour retenir le flamboyant Flash Gordon, superbe dans une combinaison d’un kitsch parfait.» (Ouest-France 21 juin 1994)

Le catcheur Canonball. Photo Ouest-France 21 juin 1994

 

Le retour du catch à Saint-Brieuc?

En octobre 2005, Ouest-France publie un article sur le retour annoncé du catch à Saint-Brieuc avec un groupe d'une dizaine d'amateurs bien décidés à relancer cette pratique. Tout est venu des retrouvailles de deux anciennes vedettes du catch des années 50, Guy Caviller et Théo Popoff (champion d'Europe des mi-lourds). Les membres de l'association Guy Caviller, huit lutteurs et deux lutteuses, s'entraînent sur le tapis de l'ASPTT, rue Paul Bert puis à La Méaugon.

En 2007, des catcheurs du club se produisent à Maroué. Après le décès de Guy Caviller, le président est Kévin Somme, alias Pedro Arenas sur le ring. White Crow, Jack Spayn et Théo Thispun (champion d'Europe des poids-légers) assurent le spectacle. 

Malgré ses efforts, le club peinera à trouver son public avant de relancer cette activité en 2014 à La Malhoure (proche de Lamballe) avec Régis Béreschel et Alexandre Choron qui s'étaient connus au club de Saint-Brieuc. Ouest-Catch est le nom de leur club...

De son côté, Bretagne Wrestling Catch a essayé de proposer une autre approche du catch avec des combats scénarisés entre 2008 et 2012...

Popoff et Caviller avec leurs ceintures. 31 octobre 2005 Ouest-France

 
Les sportifs de Ouest Catch.16 octobre 2014 Ouest-France


Le saviez-vous ?

Le 4 février 1972, un grand gala de catch s'est déroulé dans la salle du C.O.B, 14 rue Saint-Benoit avec L’ange Blanc (immense vedette du moment) contre Lasartesse et un grand match à quatre France-Japon avec le terrible Chéri Bibi, très grande vedette du catch à la télévision commenté par Roger Couderc. 

Roger Trigeaud, dans la vraie vie inspecteur des impôts en retraite, portait le costume à rayures des prisonniers ! Le public se passionnait pour ce personnage du repris de justice cherchant le salut, tout droit sorti d'un roman de Gaston Leroux.

1972 Annonce Ouest-France

Image R.Krafft

 

Si vous avez des documents ou des témoignages à apporter sur cette histoire du catch, merci d'utiliser le formulaire de contact en haut de page, en laissant votre adresse mail pour vous recontacter.

 

 

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Sources

Nombreuses recherches dans les archives de Ouest-France.

Portrait du catcheur Jean Corne, cliquer ici 

Histoire du catch féminin par Michel Bezy, cliquer ici

Le blog de Bob Plantin, cliquer ici


 

 

 

 

vendredi 1 novembre 2024

Le quartier de Robien à Saint-Brieuc et la Guerre 14-18 (nouvelles du front, monument de la paroisse...)

 
 
 

Monument aux morts de la ville de Saint-Brieuc. Photo RF
 
On peut d'ailleurs noter que le Comité des Fêtes de Robien a contribué à sa mesure à l'édification de ce monument de la ville de Saint-Brieuc en versant la somme de 100 francs en 1920.
 
 
La guerre 14-18 et la paroisse de Sainte-Anne de Robien

L'annonce des premières victimes


Le bulletin paroissial est une source d’informations très intéressante pour mieux comprendre comment cette guerre de 14-18 a été ressentie par les paroissiens de Robien. 

Très vite, malheureusement, l’annonce des trois premières victimes va endeuiller le quartier : l’adjudant Auguste Pansart ; le sergent Auguste Poudoulec ; Pierre Hux, de la rue Luzel.

Auguste Pouloudec, un habitant du boulevard Hoche, est tué le 30 août aux environs de Sedan. C’est l’abbé Le Douarec, l’aumônier militaire du 271e, qui lui ferme les yeux. Il était parti le dimanche 9 août après avoir communié à l’église de Robien de très bonne heure, avant le lever du jour.

Pour chaque défunt, un service est célébré à l’église Sainte-Anne.

En novembre, d’autres mauvaises nouvelles arrivent et un service est dit pour Maurice Eno, blessé à Dixmude et mort à l’hôpital de Dunkerque.

Quand les hommes de la classe 1915 se mettent en route le 18 décembre 1914 pour rejoindre les régiments auxquels ils sont affectés, le curé détaille leur état-civil et leur affectation. Il précise que tous ces jeunes gens ont assisté à deux messes célébrées à leur intention avant leur départ et ont reçu la communion : « Qu’ils demeurent bons français et bons chrétiens ! »

Les blessés sont également très nombreux : François Le Breton, 30 rue Luzel, est blessé au bras droit ; Jean Le Charpentier, 34 rue Luzel, est atteint d'un éclat d'obus au côté gauche, il est hospitalisé à Fougères... La liste est longue.

 

Le 71e Régiment d'Infanterie, une rue porte son nom. Archives municipales

 

 

Les premiers prisonniers

 

Les prisonniers du quartier, détenus en Allemagne ne sont pas oubliés : 

M. Reux ; M. Pléven ; Louis Feurgard ; Ernest Moulin, le sergent Le Gall, tous de la rue Jules Ferry ; l’adjudant Dagort du boulevard Hoche, le sous-lieutenant Guillory de la rue Luzel (ces deux derniers, appartenant à la même compagnie, sont faits prisonniers à Magdeburg le 9 octobre 1914), M. Kerhouse de la rue Luzel. L'abbé Pierre Morcel est également prisonnier.

Un peu plus tard un autre prisonnier est ajouté, M. Kerbiriou de la Croix-Péron.

 

 

 Un Livre d'or

 

Dans une rubrique intitulée « Les braves », le curé indique que « les paroissiens de Sainte Anne continuent à faire bravement et glorieusement leur devoir » mais l’état des lieux des prisonniers, des blessés et des morts montre l’étendue des dégâts. Un appel est lancé pour que les familles de Robien signalent « tout ce qui concerne les paroissiens qui sont au feu ». 

Tout sera consigné dans le bulletin paroissial et constituera le Livre d’or de Sainte-Anne de Robien. L’idée du curé est la suivante : « Nos absents sont en ce moment en train d’écrire une magnifique page de notre histoire paroissiale. Il faut que nos archives conservent à jamais le souvenir de la vaillance et des actions éclatantes, et des blessures et de la mort glorieuse de chacun des habitants de cette jeune paroisse. »

Le patriotisme est mis en avant comme lorsqu’on apprend qu’un généreux donateur a fait cadeau d’un superbe drapeau tricolore à l’église Sainte Anne.

Les récits de combattants apportent de nombreux détails de la vie quotidienne comme celui de M. Pelé, qui écrit le vendredi 23 octobre d’Avesnes-le-Comte dans le Pas-de-Calais. Il donne des nouvelles des destructions subies par la basilique d’Albert, car on lui en a demandé et ajoute: « Ces sauvages semblent avoir pris à cœur de tout démolir sur leur passage ». 

 

La basilique d'Albert et sa statue de la Vierge penchée

Pendant la guerre 14-18, l'abbé Pelé donne de ses nouvelles sur le front et ses courriers sont publiés dans le journal de la paroisse. Les petites et les grandes  histoires s'y côtoient : 

"Nous avons un cantonnement excellent. Il a fallu le disputer aux rats ; mais nous avons  fini par avoir le dessus...  

Nous assistons à la plus grande bataille qui se déroule depuis plus de quinze jours aux environs d'Arras... 

Je suis navré des tristes nouvelles que vous m'annoncez (la mort de trois de nos paroissiens). Veuillez me servir d’interprète auprès des familles éprouvées pour leur dire la part que je prends au malheur qui les frappe et les assurer que je n'oublierai pas leurs chers disparus dans mes prières."

En mars 1915, le bulletin paroissial cesse de fournir des informations car l’abbé Le Roux est mobilisé et son vicaire, l’abbé Pelé, était parti dès le cinquième jour de la mobilisation. 

 

 

Des troupes stationnées à Robien. 1916

 

L'édition de Ouest-Eclair du 17 juin 1916 nous apprend qu'un détachement militaire s'est installé dans la quartier de Robien, dans un chantier en face des Forges-et-Laminoirs.

 

Militaires à Robien 17 juin 1916 Ouest-Eclair

 

Un monument en hommage aux victimes

 

En février 1919, le bulletin paroissial sort à nouveau et l’idée d’un monument pour rendre hommage aux victimes est évoquée sur quelques lignes. Une souscription est ouverte mais le curé attend la signature du Traité de Paix avant de commander cet ouvrage d’art.

En attendant cette réalisation, de nombreux portraits détaillés sont faits des victimes ; des petits articles nécrologiques sont rédigés à partir des éléments fournis par les familles comme pour Auguste Pansart ou encore Auguste Poudoulec.

 

Le dimanche 27 juin 1920, le monument commémoratif des Morts de la Grande Guerre est placé dans l’église Sainte-Anne de Robien. « Il fait honneur et à l’artiste M. Le Goff, qui l’a conçu et exécuté et aux paroissiens qui l’ont offert ». Le monument s’élève à la place de l’ancien autel que le séminaire avait prêté à la paroisse. 

Ce 27 juin, un service est chanté pour les 66 victimes de la paroisse. La bénédiction du monument est accompagnée par de nombreux paroissiens et par une délégation du Conseil municipal, répondant à l'invitation de M. le curé.

 

Ci-dessous, cette facture de l'entreprise de M. Elie Le Goff pour la restauration d'une statue de Duguesclin à Saint-Brieuc nous renseigne sur ses différentes spécialités  : statues religieuses, chemins de Croix en terre cuite, bois et pierre blanche, menuiserie d'églises, autels, chaires à prêcher...

L'entreprise Le Goff était située 27 rue du Légué (voir son portrait plus bas, rubrique Le saviez-vous?).

 

Facture délivrée par la maison Le Goff en 1906. Archives municipales 3L135

 


Retrouvez la liste des victimes du quartier de Robien pendant  la Guerre 14-18  en cliquant ici


Cet autel permet aux paroissiens de venir comme pour un pèlerinage et de méditer et prier devant.

Les inscriptions sont les suivantes :

« La paroisse reconnaissante » 

 

et plus bas 

« Aux enfants de Sainte-Anne de Robien morts pour la Patrie 1914-1919 » 

 

Autour du médaillon : 

« Pro Deo, pro Patria ceciderunt, c’est pour Dieu, et la Patrie qu’ils sont tombés ».

 

Les sculptures symboliques sont les suivantes : Croix de guerre, palmes, fusils entrelacés, ancres, épées.

 

Croix de Guerre

Les noms des 66 victimes sont gravés en lettres rouges. L’idée dominante du monument est pour le curé « l’idée de la rédemption et de la victoire par le sacrifice ». La ville de Saint-Brieuc comptera 925 victimes en tout.

Cet ensemble peut être rapproché de celui réalisé par elie Le Goff à Etables où figure une inscription assez semblable : « Pro Deo, pro Patria. Fortes ceciderunt". 

 

Détail. Église d’Étables. Photo RF 2023

La description complète en est faite par le curé de Robien dans le bulletin paroissial :

"Voyez les sculptures symboliques : ces croix de guerre, ces palmes sur lesquelles s’entrelacent les fusils, les ancres, les épées : tout cela vous dira la force de leurs bras et leurs titres de gloire.


Voyez encore ces deux plaques de marbre, je pourrais dire ces deux pierres tombales, car la plupart d’entre eux n’en auraient jamais d’autres, où les noms des 66 victimes sont gravés en lettres rouges, symbole du sang qu’ils versèrent et de l’amour surhumain qui les anima.

Mais retenez surtout l'idée dominante du monument : c'est l'idée de la rédemption et de la victoire par le sacrifice.


Sous la table de l’autel, dans le panneau du milieu, un médaillon représente la mort du poilu. C’est un petit chef d’œuvre.
Mortellement blessé, le soldat va rendre le dernier soupir. Son fusil est tombé de ses mains défaillantes. Appuyé contre un arbre déchiqueté, réconforté par un prêtre, soldat lui même, le petit Français meurt tranquille, avec la satisfaction du devoir accompli, la figure reposé et  fière et les yeux fixés sur un calvaire qui se dresse à quelques pas. Le sacrifice du soldat rachète et sauve la patrie
".


La chapelle se trouvant encore de nos jours dans l'église de Planguenoual a de fortes similitudes et elle est aussi d’Élie Le Goff (voir page 88 du livre Faire son deuil, construire les mémoires. Yann Lagadec. Éditions A l'ombre des mots).

Église d’Étables. Photo RF 2023

 

Ci-dessous la description complète


 

Le dimanche 27 juin 1920, une cérémonie est organisée pour inaugurer le monument et le bénir. L’église est archi comble. Dehors, presque autant qu’à l’intérieur. Au premier rang il y a une délégation du Conseil municipal, le Conseiller général, le Général, le Colonel, un certain nombre d’officiers, de nombreuses personnes du clergé.

Le lundi 28 juin 1920 se déroule un service pour les 66 victimes du quartier. On peut imaginer la douleur de toutes les familles rassemblées en cette occasion...

 

Qu'est devenu ce monument ?

Malheureusement, ce monument commémoratif a été enlevé de l'église Sainte-Anne de Robien au moment de travaux de rénovation.
Les recherches pour le retrouver n'ont encore rien donné...

 


 Le saviez-vous ? 


Le sculpteur Elie Le Goff (1858-1938) qui a conçu le Monument aux morts de la Guerre de 14-18 pour l'église de Robien n'est autre que le père de ses trois fils Paul, Elie et Henri, sculpteurs comme lui et morts au combat en 14-18. La ville de Saint-Brieuc leur a rendu hommage en désignant l'ancienne rue du Légué où vivait la famille : Rue des Trois frères Le Goff. 

Elie Le Goff a réalisé plus d'une vingtaine de monuments aux morts. Il est aussi l'auteur à St Brieuc des sculptures autour de l'horloge de la Poste, du buste de Villiers de l'Isle Adam. Et le plus émouvant, c'est lui qui a réalisé le médaillon en bronze avec ses trois fils sur la tombe toujours visible au cimetière Saint-Michel (voir ci-dessous). 


Les 3 frères Le Goff. Cimetière Saint-Michel


Fiche Wikipédia Elie Le Goff en cliquant ici

Article très complet sur les oeuvres de la famille Le Goff, sur Breizh-info.com, en cliquant ici



 

D'autres monuments commémoratifs dans les églises

 

De nombreux monuments commémoratifs  ont été édifiés dans les églises pour honorer les victimes de la Guerre 14-18. Ci-dessous, une partie du monument de Lassay-les-Châteaux qui peut avoir une similitude avec celui de Robien. On y retrouve en effet une liste de noms en rouge et des palmes sur les côtés.


Photo Christine Leduc-Gueye

 

 Ci-dessous un autre exemple dans le hameau de Pélasque (06).


Monument 14-18 à l'intérieur de l'église de Pélasque (06)



Ces œuvres, propres à l'église catholique, reprennent les thèmes des monuments aux morts des communes. Mais elles s'en distinguent car elles font figurer les membres d'une paroisse dans les villes, ce qui est différent du cas d'un village où tout le monde est cité. Dans certains cas, le curé peut se réserver le droit de ne pas faire figurer le nom d'un soldat hostile à l'église. Une famille anti-cléricale peut aussi se réserver le droit de ne pas être sur le monument de la paroisse.

Les monuments à l'intérieur des églises se différencient aussi des monuments civils car ils mettent en avant des symboliques religieuses :  sacrifice, consolation et espérance dans le Christ et la Vierge. Elles associent Dieu et la Patrie (Pro Deo, pro Patria), la croix et le drapeau

 

 

L'école des Filles, boulevard Carnot, transformée en hôpital militaire


Germaine Hello, une ancienne élève de l'école des Filles installée alors boulevard Carnot, raconte : "Je me plaisais beaucoup à l'école Carnot... mais pendant l'année scolaire 1917-1918, nous avons dû laisser la place aux blessés de guerre".

 

Ecole des filles, boulevard Carnot. Archives municipales

 

Quand Germaine Hello (Guays par son nom de mariage) raconte que l'école des filles a été fermée à la dernière année de la Guerre 14-18, elle fait référence à cette période où la Ville de Saint-Brieuc avait été obligée de trouver des lieux pour soigner les victimes de la guerre. 

Quatorze hôpitaux étaient ouverts et l'école des Filles, 15 boulevard Carnot était désignée comme "Hôpital complémentaire 100". 

Cet hôpital possédait 122 lits et avait déjà fonctionné du 1er juin 1915 au 10 mai 1916.

 

Hôpitaux accueillants des militaires en 14-18. Ecole des Filles n°8 sur le plan. Document Le Télégramme.

 

Une plaque pour François Clairon

En juin 1920, une plaque va être posée à l'école en mémoire de M. Clairon, instituteur-adjoint à l'école Guébriant et tué en 14-18.


François Clairon 22 juin 1920. La dépêche de Brest.

 

A Saint-Brieuc

Le bilan global des pertes humaines est effroyable sur Saint-Brieuc, la liste qui figure sur le Monument aux morts fait état de 670 victimes. Le nombre des blessés et malades de guerre est équivalent. Le département des Côtes-du-Nord fut le cinquième de France comme nombre d'orphelins de guerre, ou "pupille de la Nation". Les pupilles recevaient des allocations pour aller à l'école ou en apprentissage, jusqu'à 18 ans. En 1922, le nombre de pupilles du département dépassait 12 000, dont 400 à St Brieuc.

En 1918, la Ville voulant honorer son régiment qui avait tant lutté et tant souffert, donna le nom de Rue du 71e Régiment d'Infanterie à la rue du Lycée (Le Braz). Elle donna aussi le nom de Boulevard Clémenceau au boulevard National. Puis en 1919 transforma la Place d'Orléans en Place du 74e Régiment Territorial (d'après J.B Illio, Histoire de St Brieuc 1931).

   

 

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La liste des victimes du quartier de Robien pendant  la Guerre 14-18 

  

Le saviez-vous ?

La Guerre de 1870 avait beaucoup marqué les Français avant celle de 14-18. Dans le quartier de Robien, on peut signaler que Jean Durand, habitant au 3 rue de Robien a été récompensé en juin 1912 par l'attribution de la Médaille commémorative de la campagne 1870-1871. Cette médaille a été créée par la loi du 9 novembre 1911.

Médaille de la Guerre de 1870

Le saviez-vous ?

De nombreuses personnes du quartier ont heureusement survécu à cette guerre de 14-18. Ainsi peut-on signaler par exemple Gaston Le Tallec, né à Rouen, habitant 96 boulevard Hoche, employé à la S.N.C.F, marié avec Berthe Cariou, lieutenant de réserve, Croix de Guerre 1914-1918, Chevalier de la Légion d'honneur, décédé dans sa 79e année, dont les obsèques ont eu lieu en l'église de Robien le 18 décembre 1961. (Avis dans l'édition du 16 décembre, Ouest-France)

 

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Sources 

 

Bulletin paroissial, années 1914 à 1920, disponible aux Archives départementales 22; article sur l'autel des Morts juin 1920.


Les représentations de la Grande Guerre sur les monuments aux morts peints en Pays de la Loire. Christine Leduc-Gueye. Open Edition Presses Universitaires de Rennes.


Hôpitaux St Brieuc, forum 14-18, ici 

 

Les Bretons dans la Guerre de 14-18, Jean-Pascal Soudagne, éditions Ouest-France

 

Archives municipales de St Brieuc, factures de M. Le Goff 3L135

 


 


L'histoire du quartier de Robien à Saint-Brieuc. Sommaire

Le quartier de Robien à Saint-Brieuc s’est vraiment peuplé il n’y a pas plus d’un siècle, mais son histoire présente de multiples intérêts ...